Visiter un township : est-ce vraiment éthique ?

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Visage de Langa, le township que j’ai visité à Cap Town.

Se rendre dans un township à Johannesburg ou au Cap est une expérience tentante mais clivante en raison de son côté voyeuriste. Est-ce assez éthique de se rendre dans un bidonville en Afrique du Sud ? Mes conseils pour prendre votre décision en toute sérénité.

S’interroger sur la pertinence de réserver une visite dans un township en Afrique du Sud me semble déjà une très bonne chose. En effet, lorsque vous devrez prendre une décision face à vos compagnons de voyage, mieux vaut avoir anticipé vos arguments.

J’étais moi-même très mal à l’aise à l’idée de me rendre dans un bidonville en Afrique du Sud, comme je l’avais été pour les favelas à Rio de Janeiro auxquelles j’avais finalement renoncé. Absolument pas pour des questions de sécurité mais pour des questions morales. Peut-on décemment aller visiter les pauvres d’un pays dont on est étranger et observer leur misère comme dans un zoo ?

Je n’avais d’ailleurs absolument pas inclus cette « sortie » à mon programme à Cap Town. J’ai finalement cédé face à l’instance de mon amie brésilienne (justement!). En effet, elle a sélectionné un guide local né dans le township de Langa pour s’assurer d’un respect total de ses habitants. Nous avons opté pour une visite historique et sociologique sur l’émergence et le développement de ce bidonville.

Choisir un guide issu du township pour la visite

Il est indispensable de réserver une visite uniquement avec un guide qui est né et qui a grandi dans le township. Non seulement, vous lui assurez un revenu décent, mais en plus, il aura à cœur de respecter ses voisins et la visite se déroulera dans la discrétion et la pudeur, deux choses vraiment importantes pour moi.

En plus, votre guide local connaîtra le township comme sa poche et vous racontera des anecdotes vivantes sur son lieu de vie : les bêtises qu’il faisait à l’école, où il draguait les filles avec ses copains, ses rêves d’enfant etc. Il saura évidemment vous renseigner avec précision et exactitude sur l’histoire du township, pour l’avoir vécue de l’intérieur.

Autre avantage : il ne cherchera pas seulement à vous dépeindre un portrait documentaire horrible des township mais insistera sur ses évolutions positives. Vous constaterez sûrement que les logements sont relativement bien tenus et que les enfants des familles même très modestes toujours présentables. Cela évite de tomber dans le misérabilisme.

Si vous avez la possibilité, prenez un guide indépendant recommandé par plusieurs autres touristes. Évidemment ne vous fiez pas à n’importe qui ! Si vous passez par une agence par souci de simplicité, assurez vous que vous formerez un petit groupe et que l’essentiel des bénéfices revient bien au township.

Lire ici quatre choses à faire au Cap.

Interagissez dans le respect avec les habitants du township

Votre guide local vous conduira probablement chez l’habitant. A Langa, le township que j’ai visité à Cap Town, nous avons rencontré deux familles. L’objectif était de nous montrer les différents niveaux de vie. On a commencé par un habitat partagé de misère type bidonville en tôle pour ensuite se rendre dans un petit logement en dur avec plusieurs pièces distinctes.

Normalement, votre guide local doit reverser une partie des revenus de la visite à ces familles, ce qui aide à faire passer la pilule. J’avais prévu de ne pas prendre de photos mais les enfants et adolescents en ont réclamé donc j’ai compris que cela ne posait pas de problème. Mais évidemment attendez l’accord express de votre guide et de la famille pour ce faire.

Si toutefois ce concept vous met mal à l’aise, d’autres options s’offrent à vous comme cuisiner et partager un repas avec une famille ou dormir dans une auberge de jeunesse tenue par des habitants du quartier. Ou mieux, effectuez du volontariat avec une association reconnue. Vous gommerez ainsi ce côté « voyeuriste » tout en participant à la vie de la communauté.

Le township : puits d’information sur la vie en Afrique du Sud

Le township de Langa a été construit en 1927 pour accueillir la population noire du Cap. Construit dans la banlieue de Cap Town, c’était aussi un moyen de discriminer une partie de la population lors de l’Apartheid. Une visite dans un bidonville en Afrique du Sud vous permettra donc de mieux comprendre l’histoire de ce « régime politique » qui a duré de 1948 à 1991.

Vous en apprendrez aussi beaucoup plus sur la politique en Afrique du Sud. Il faut savoir que tout le monde, depuis le chauffeur de taxi jusqu’à la femme de chambre a son avis sur la question. Certains se plaignent du gouvernement très corrompu, d’autres prônent la discrimination positive vis-à-vis de la minorité noire tandis que certains n’hésiteront pas à vous faire part de leur nostalgie de l’ancien système…

Sociologiquement, la visite du township vous permettra de découvrir l’école, les lieux culturels et sportifs, les magasins appréciés par la communauté noire sud-africaine. Vous assisterez à d’intéressantes scènes de la vie quotidienne comme la cuisson d’un animal ou un passage chez le coiffeur. Vous noterez aussi que quelques shops sont habitués à voir des touristes.

Une évolution sociale au sein du township

Il se trouve que les habitants du township sont amenés à évoluer socialement. Ne soyez pas surpris de voir aussi bien des dortoirs ouvriers que de coquets pavillons. Ces derniers sont le modèle de la réussite et la plupart des habitants de la banlieue y resteront jusqu’à leur dernier souffle.

Enfin, aussi triste que peut-être l’histoire du XXe siècle en Afrique du Sud et dans ses township, force est de constater que la vie depuis Langa est assez incroyable. On voit au loin Table Mountain, la montagne emblématique de Cap Town. Et lorsque l’on passe devant une belle rangée de voitures rutilantes, on recouvre espoir en l’ascension sociale.

Et vous, considérez-vous qu’une visite dans un township peut-être éthique ?

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